Taxe sur les bureaux en Île-de-France : le critère de l'utilisation effective des locaux prime sur la nature de l’activité de l’entreprise
En matière de taxe sur les bureaux, ce n'est pas la nature de l'activité de l'entreprise bailleresse qui doit être prise en compte pour apprécier la catégorie d'imposition des biens, mais l'utilisation effective des locaux par les sociétés avec lesquelles elles ont signé un contrat de prestation de services. Doivent être qualifiés de bureaux des locaux conçus pour un usage de bureau et effectivement utilisés comme tel.
Une taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement annexées à ces catégories de locaux est perçue en Île-de-France. La taxe est due pour les locaux à usage de bureaux, qui s'entendent, d'une part, des bureaux proprement dits et de leurs dépendances immédiates et indispensables destinés à l'exercice d'une activité, de quelque nature que ce soit, par des personnes physiques ou morales privées, ou utilisés par l'État, les collectivités territoriales, les établissements ou organismes publics et les organismes professionnels, et, d'autre part, des locaux professionnels destinés à l'exercice d'activités libérales ou utilisés par des associations ou organismes privés poursuivant ou non un but lucratif. Elle est également due pour les locaux commerciaux, qui s'entendent des locaux destinés à l'exercice d'une activité de commerce de détail ou de gros et de prestations de services à caractère commercial ou artisanal ainsi que de leurs réserves attenantes couvertes ou non et des emplacements attenants affectés en permanence à la vente. Sont exonérés de la taxe les locaux à usage de bureaux d'une superficie inférieure à 100 m², ainsi que les locaux commerciaux d'une superficie inférieure à 2 500 m² (CGI art. 231 ter, V-3°).
En l’espèce deux sociétés ont été assujetties à la taxe annuelle sur les bureaux à raison d'un immeuble situé, pour l’une, dans le 10ème à Paris et, pour l’autre, dans le 19ème. Elles soutiennent que leurs locaux, destinés à un usage commercial et d'une superficie inférieure à 2 500 m², doivent à ce titre être exonérés de ladite taxe. Après un rejet de leur demande devant le tribunal, elles font appel.
En premier lieu, les deux sociétés font valoir qu'elles exercent une activité consistant à mettre à disposition des espaces de travail pour des entreprises auxquelles elles fournissent différentes prestations de services, notamment l'accueil des visiteurs, la réception du courrier, l'entretien et le nettoyage des locaux, la domiciliation du siège social, la mise à disposition de matériel informatique, ainsi que des services optionnels tels que des prestations de conciergerie, de restauration, ou de conseil administratif et comptable. Elles soutiennent ainsi que c'est à tort que l'administration fiscale a considéré que leur activité se limitait uniquement à louer des espaces à usage exclusif de bureaux et a refusé de faire application de l'exonération de taxe prévue pour les locaux commerciaux d’une superficie inférieure à 2 500 m² (CGI art. 231 ter, V-3°).
Toutefois, contrairement à ce que soutiennent les sociétés, ce n'est pas la nature de leur activité qui doit être prise en compte mais l'utilisation effective des locaux par les sociétés avec lesquelles elles ont signé un contrat de prestation de services. Or, il résulte de l'instruction que lesdits locaux sont, conformément à l'objet social des deux sociétés, conçus pour un usage de bureau et effectivement utilisés comme tel par leurs clients, dont il n'est pas établi ni même allégué qu'ils les utiliseraient, en tout ou en partie, comme des locaux commerciaux dans lesquels ils recevraient leurs propres clients.
Pour la cour administrative d’appel de Paris, l’administration fiscale n’a donc commis ni erreur de droit ni erreur d'appréciation, en considérant que les locaux en cause étaient des locaux à usage de bureaux qui, dès lors qu'ils occupaient une superficie supérieure à 100 m², n'étaient pas exonérés de la taxe.
À noter. Cette décision confirme la jurisprudence du Conseil d’État (CE 24-4-2019 n° 417792) selon laquelle seule l'utilisation effective des locaux au 1er janvier de l'année d'imposition doit être prise en compte pour apprécier si les locaux relèvent de la catégorie des bureaux ou des locaux commerciaux en matière de taxe sur les bureaux.
CAA Paris 10-11-2022, n° 21PA04670
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