Les parties d’un acte sous signature privée peuvent prouver la date par tous moyens

La date d’un acte sous signature privée peut être prouvée à l’égard des tiers uniquement selon certaines modalités fixées par la loi. En revanche, cette preuve peut être apportée par tous moyens entre les parties à l’acte.

Un pacte conclu entre les associés d’une société met à la charge des signataires une clause de non-concurrence à compter de la date de signature du pacte ; or ce pacte n’est pas daté. Cette lacune est invoquée par un des signataires qui, après avoir perdu sa qualité d’associé, est poursuivi par la société pour violation de la clause de non-concurrence.

Une cour d’appel juge que l’absence de date vide de sa substance l’obligation qui est opposée à l’associé, dès lors qu’un acte sous seing privé n’a pas date certaine, sauf s’il est enregistré, et que la date de l’acte ne peut pas être déduite du contexte dans lequel il a été établi. La société ne peut donc pas se prévaloir, à l’égard du signataire poursuivi, de la clause de non-concurrence figurant dans le pacte d’associé.

La Cour de cassation censure ce raisonnement : si un acte sous seing privé n’a de date contre les tiers que du jour où il a été enregistré, du jour de la mort de celui ou de l’un de ceux qui l’ont souscrit, ou du jour où sa substance est constatée dans un acte dressé par un officier public (C. civ. ex-art. 1328), en revanche, entre les parties à un acte non daté dont l’existence n’est pas contestée, la preuve de sa date peut être faite par tout moyen.

À noter

Précision nouvelle qui, rendue à propos d’un pacte d’associé, vaut pour tout acte sous signature privée.

La liste des cas dans lesquels un acte sous signature privée acquiert date certaine à l’égard des tiers, ce qui exclut que la preuve de cette date soit rapportée autrement. Même si les exigences ainsi posées par l’ancien article 1328 (désormais reprises par l’article 1377) du Code civil datent de 1804, c’est la première fois que la Cour de cassation en écarte l’application entre les parties ; tout au plus avait-elle précisé qu’elles n’étaient pas applicables en matière commerciale (notamment, Cass. com. 4-5-1999 no 97-12.085).

 

Cass. com. 20-3-2024 no 23-11.844

© Lefebvre Dalloz

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